Danger des orages

   

    « Un orage peut présenter à peu près toutes les conditions météorologiques dangereuses connues de l'aviation » : une mauvaise visibilité, la foudre (éclairs), de fortes précipitaions (grêle, averses), des conditions de givrage, vents et rafales, micro rafales (effet de cisaillement), turbulences, ... La liste est longue. Dans cette partie nous nous intéresserons surtout aux effets de la foudre et des précipitations.


La foudre

    Avec une énergie allant jusqu’à 500 MJ, on pourrait croire que si la foudre venait à frapper un avion, celui-ci serait détruit, déchiré ou même incendié. Mais il n’en est rien et si les avions en sortant pratiquement à chaque fois indemne, c’est entre autres grâce à la propriété conductrice des avions, constitués essentiellement d’aluminium.  Néanmoins, une décharge de foudre peut tout de même affecter différentes parties d’un avion. On distingue :  

• les effets directs : un échauffement thermique (dû aux forts courants sur la surface de l'avion) associé à une onde de choc pouvant conduire à une dégradation mécanique de la peau de l'avion aux points d'entrée et de sortie de la foudre,

• les effets indirects résultants de la pénétration à l'intérieur du fuselage des courants et de champs électromagnétiques. Ils sont susceptibles de provoquer des dommages irréversibles ou des dysfonctionnements. Les systèmes électroniques peuvent être mis hors-service en quelques millisecondes.

 

Si la foudre est le phénomène le plus spectaculaire, ce n'est pourtant pas le plus craint des pilotes. Le courant électrique, même d'une très forte intensité ne pénètre pas à l'intérieur (phénomène de la cage de Faraday, expliqué plus bas). En fait la décharge électrique qui frappe l’appareil est conduite par la surface en aluminium jusqu’à une autre extrémité de l’avion (aile, queue, parfois même par le nez, selon le lieu d’«arrivée» de la foudre).

 

 

La foudre touche un appareil en moyenne une à deux fois par an, selon les experts.


Cage de Faraday

    Pourquoi si peu de dégâts ? Parce que l'intérieur de l'avion est protégé par le fuselage en alliage d'aluminium, très bon conducteur électrique. Le courant se contente de parcourir la surface extérieure de l'appareil, avant de reprendre sa route vers le sol par les airs. C’est le principe de la Cage de Faraday, étudié par Michael Faraday lors de ses travaux sur les conducteurs (vers 1820).


Définition : Une cage de Faraday est une enceinte ou cage métallique qui permet d’isoler une portion d’espace contre l’influence des champs électriques extérieurs. A l’intérieur de la cage, le champ électrique est nul, même si des charges sont placées à l’extérieur ou si la cage est reliée à un générateur électrostatique.

 

Par exemple, une voiture ou un avion à carrosserie métallique est une cage de Faraday qui protège ses occupants contre les dangers d’électrocution provenant d’un contact extérieur ou d’une décharge atmosphérique (foudre).

Inversement si on introduit des charges à l’intérieur d’une cage de Faraday mise à la terre, le champ électrique à l’extérieur n’en sera pas perturbé.

Les ondes radio donc électro-magnétiques ne traversent pas (en théorie) les cages de Faraday, ce qui empêche de faire fonctionner correctement, à l’intérieur des avions, des récepteurs ou des émetteurs (téléphones portables entre autres). Pour éviter ce problème de réception, on installe parfois une antenne à l’extérieur sur la surface.

Exemple : les voitures comme les avions disposent d’antennes radio placées à l’extérieur pour pouvoir mieux capter.

 

Répartition des antennes de communication sur un Boeing 737

 

    Ainsi, le champ électrique et électromagnétique à l’intérieur d’un avion ne change normalement pas lorsque la foudre le touche, malgré une tension de plusieurs millions de volts atteinte sur la surface de l’avion.

Remarque : L’efficacité du blindage d’une cage pour une certaine onde, dépend de la longueur λ de cette onde et du diamètre des trous qui pourraient se trouver dans la paroi.

 

Si tout se passe bien la foudre devrait entrer en contact avec l’avion et ressortir ensuite, la coque de l’avion conduisant l’électricité. Ici, un A380 d’Airbus.

 


Cet avion a été foudroyé. Le trou qu'on apercoit sur l'image est significatif de la puissance de la foudre.

Effets sur les systémes électroniques

    La croissance du nombre de systèmes électroniques dans les avions imposent de nouvelles études des effets que peut avoir une telle agression.

Certaines évolutions technologiques récentes (notamment l’utilisation de composites, voir plus bas) ont conduit les avionneurs à prendre en compte cet environnement dans la conception de l'avion. En particulier, les systèmes électroniques, de plus en plus utilisés, et liés aux fonctions critiques (commandes de vol, contrôle moteur, avionique…) de l’avion : leur protection doit être particulièrement étudiée.

Malgré le principe de la Cage de Faraday, la foudre qui frappe l’avion est qui est conduite par le fuselage jusqu’à son «point de sortie» cause quelques désagréments, et ce presque à chaque fois. L’intensité de la foudre est telle qu’elle génère un champ électromagnétique qui touche l’intérieur de l’avion. Ainsi, la plupart des systèmes électroniques à bord sont hors d’usage, mais pour quelques secondes normalement. Si cela n’est pas le cas les pilotes font un redémarrage des systèmes.

Si, au moment où la foudre frappait l’avion, des courants électriques de forte intensité venaient à emprunter les circuits électriques intérieurs (en théorie, peu problable) ils pourraient entraîner la destruction ou un dysfonctionnement des systèmes électriques. Et, dans les avions modernes, même les gouvernes sont commandées électriquement. Cela pourrait poser de sérieux problèmes.


Les avions en composites

    Les avions de la nouvelle génération, par souci de légèreté (donc d’économie de carburant), ont une structure développée avec un fort pourcentage de matériaux composites. L’utilisation de ces types de matériaux dans la construction des avions n’est en soi pas un phénomène nouveau : Au milieu des années 1980, les constructeurs utilisaient des matériaux composites dans des parties secondaires de la structure de l’avion (ex : les bords des ailes) et pour les surfaces de contrôle. En 1988, Airbus avec son A320, a produit le premier avion commercial avec une queue entièrement en composite.

 

    Pourcentage du poids attribué aux matériaux composites

 

Les matériaux composite utilisés en aéronautique sont généralement produits en combinant des couches de fibres de carbone ou de verre avec de l’époxy (résine).

Plus récemment, les constructeurs ont étendu l’usage du composite au fuselage et aux ailes, car ces matériaux sont généralement plus légers et plus résistants à la corrosion que le métal utilisé traditionnellement sur avion.

 

Boeing 787 “Dreamliner” et Airbus A350 XWB (eXtra Wide Body)

 

 

    Plus précisément il s’agit du dernier de Boeing, le 787 “Dreamliner” et du futur biréacteur d’Airbus, l’A350 XWB.

Le Boeing 787 est le premier gros porteur commercial construit majoritairement en composite. Il est entré en opération en octobre 2011. Le composite représente 50% du poids de l’appareil (hors moteur). L’Airbus A350 suivra, avec une proportion de composite même légèrement supérieure à celle de son concurrent de chez Boeing, notamment le fuselage innovant et exclusif de l'A350 XWB en plastique renforcé de fibres de carbone (CFRP).



                    Les matériaux utilisés pour le Boeing 787

Le problème

    L'emploi de ces nouveaux matériaux composites, à base de fibres de carbone et de résine, accroît en fait leur vulnerabilité, car ces parties non-métalliques ont une moindre capacité à drainer la foudre.

En effet , « Le composite n'étant pas conducteur, les charges électriques ne s'écoulent pas. Il y aurait donc claquage, comme dans l'air, et risque de perforation du composite, la foudre pénétrant alors dans l'avion », explique Michel de Gliniasty, directeur scientifique général de l'Onera (Office national d'études et de recherches spatiales).

Le principe de la cage de Faraday n’est donc plus rempli par ces structures en composites et le risque devient énorme pour les avions face à la foudre.

Ainsi, les constructeurs ont dû trouver une solution pour remédier à ce problème.


Les précipitations (pluie, neige, grêle)

    De fortes précipitations peuvent affecter l’avion de manière semblable au givrage : Modification du profil aérodynamique, perte de la visibilité, troubles pour les instruments,... Toutefois, ces problèmes le sont dans une moindre mesure.

Comme il a été dit précédemment, cette partie traitera surtout des dangers que représentent la grêle mais aussi la neige pour un avion. On peut tout de même résumer les perturbations de la pluie :

  • Une forte pluie peut perturber considérablement la visibilité des pilotes à l’atterrissage. Les lumières et les objets peuvent sembler plus proches ou plus éloignés et ainsi tromper le pilote.
  • Elle peut produire des contaminations de piste toutefois moins pénalisantes que la neige (Excepté la pluie verglacante, qui nécéssite un traitement).
  • Si la pluie s'intensifie, une fine couche d'eau peut se créer sur la surface de l'aile, réduisant la portance et augmentant la traînée.


La neige

    La neige peut être très perturbante pour les avions, comme le témoignent les fermetures courantes pendant la période hivernale. Les effets sur les avions sont proches de ceux du givrage (voir Effets du givrage )

Rappel : Le givrage a un impact important sur le profil aérodynamique et sur la masse de l'avion.

De plus, une tempête de neige peut nécéssiter un nettoyage des pistes et engendrer des retards supplémentaires.

 




La grêle   

    Un cumulonimbus peut fabriquer en quelques minutes quelques 300 milliards de grêlons représentant une masse totale de 50.000 tonnes de glace. Ce sont autant de projectiles susceptibles d’entrer en contact avec un avion en vol, et de causer des dégâts considérables. En effet, la consistance “dure” des grêlons est capable de faire des trous dans la paroi métallique des avions.

Les dégâts peuvent être:

• l’arrêt voir la destruction des moteurs,

→ La certification JAR-E 790 impose aux turboréacteurs de pouvoir ingérer pendant       moins de 5 secondes et à pleine puissance dix grêlons de 25 mm et dix de 50 mm par m² de surface sans qu’aucune perte de poussée ne soit tolérée.

•le bosselage de la cellule et de toutes les surfaces exposées à la grêle notamment au niveau du bord d’attaque des ailes.

•la perte des moyens de communication par le bris des antennes,

•le bris des vitres du cockpit,

 

Plus le grêlon est gros, plus sa vitesse est importante, et un grêlon de 10 cm de diamètre peut atteindre jusqu'à 160 km/h.

Les dégâts sont en rapport avec la vitesse de chute des grêlons et donc de leur taille :

         -avec un diamètre de 2 cm, Vz = 75 km/h,

         -avec un diamètre de 5 cm : Vz =115 km/h

         -avec un diamètre de 10 cm : Vz = 160 km/h

La vitesse de croisière des avions de ligne à turboréacteurs est d’environ 850km/h. Donc, en croisière, le grêlon frappe l’avion avec une vitesse relative allant jusqu’à 1000km/h.


La gestion des pannes moteur

    L'évolution actuelle des moteurs d’avions a quasiment éliminé le risque d'extinction moteur (flame-out), des régulateurs numériques surveillent et régulent avec efficacité l'alimentation en carburant quelles que soient les conditions de vol.

Mais sur les appareils anciens, des problèmes de combustion peuvent se rencontrer. Avec une pluie lourde ou plus, l'humidité peut entrer dans le entrée d’air et s'introduire dans le compresseur, causant alors l'extinction du réacteur.

En outre, l'eau mais surtout la glace peuvent obstruer le tube de Pitot et les prises de pression statiques pour les instruments de bord. La mise en fonctionnement du réchauffage du Pitot sert alors à éviter ce problème. Cette mise en œuvre devrait être systématiquement utilisée dès qu'il pleut, pas seulement en conditions givrantes.